INTERVENTION
- Question écrite adressée à M. le président de la Polynésie française
- Objet : Évaluation de la loi du pays n° 2009-4 du 11 février 2009 portant application des mesures de lutte contre l’abus du tabac et le tabagisme dans notre pays.
DOCUMENTS
Monsieur le Président, ici ora na,
Les membres de notre assemblée votaient le 30 décembre 2008 à l’unanimité la loi du pays n° 2009-4 du 11 février 2009 relative à la lutte contre l’abus du tabac et le tabagisme. Le tabagisme est en effet considéré par la communauté médicale comme le principal facteur de risque environnemental de cancer du poumon, bien que l’exposition aux rayonnements ionisants ne soit pas un facteur de risque à négliger en Polynésie.
Cette loi du pays avait pour ambition affichée de diminuer la prévalence et la mortalité liée aux méfaits du tabac notamment en :
1. Facilitant la décision d’arrêter ou de réduire la consommation en tabac des fumeurs et en participant au soutien du processus d’abandon ;
2. Dissuadant les enfants et les jeunes de commencer à fumer ;
3. Dissuadant les fumeurs de fumer en présence des non-fumeurs en particulier les enfants et femmes enceintes. Parmi les instruments constituant cet arsenal juridique figuraient l’interdiction totale de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif tels que les lieux accueillant du public, les lieux de travail, les transports collectifs, les établissements de santé publics et privés, les établissements d’enseignements, les centres de loisirs, sportifs et de vacances ainsi que les établissements hôteliers, aéroports et centres commerciaux.
L’objectif recherché était de créer des environnements « Smoking free » qui seuls garantissaient une protection adéquate contre l’exposition à la fumée du tabac.
En outre, des dispositifs de contrôle par des agents assermentés ont été intégrés à cette loi du pays.
Enfin ladite loi du pays faisait également obligation d’organiser des campagnes de sensibilisation annuelle auprès de l’ensemble de la population, des professionnels de santé et des scolaires. Pour rappel l’article LP 13 prévoyait une sensibilisation pédagogique au risque tabagique devant être obligatoirement organisée dans les classes de l’enseignement primaire et secondaire ainsi que des programmes de formation et de sensibilisation en matière de lutte antitabac proposés aux professionnels de santé. Dix années se sont désormais écoulées depuis ce premier vote par notre assemblée qui instaurait un arsenal législatif censé lutter efficacement contrer les méfaits du tabagisme.
Mais pendant cette même décennie :
-92 patients polynésiens en moyenne décédaient chaque année d’un cancer du poumon selon les données partielles de la Direction de la santé entre 2011 et 2014 ;
-798 nouvelles personnes contractaient un cancer du poumon selon un document interne de la C.P.S., portant à 1 477 le nombre minimum de Polynésiens atteints de ce cancer au sombre pronostic entre 1992 et 2017.
Ce chiffre décennal de 798 nouveaux cas de cancer du poumon (soit une moyenne de 80 cas annuels entre 2008 et 2017) comparé au chiffre décennal de 499 nouveaux cas apparus entre 1998 et 2007 (soit une moyenne de 50 nouveaux cas par an) montre que l’incidence du cancer du poumon a quasiment doublé entre ces deux décennies.
Avec un coût moyen estimé de 4 500 000 XPF (quatre millions cinq cent mille francs) par patient, rien que la prise en charge de ces 798 cancéreux supplémentaires entre 2008 et 2017 aura coûté à la C.P.S. la bagatelle de 3 591 000 000 XPF (trois milliards cinq cent quatre-vingt-onze millions de francs), sans compter les souffrances physiques et morales endurées respectivement par les malades cancéreux et leurs proches.
Monsieur le Président, ma question s’articulera autour de quatre points :
1. Disposez-vous d’un bilan d’évaluation et de suivi de la loi du pays notamment d’éléments qualitatifs et quantitatifs susceptibles de vérifier que les objectifs fixés ont été atteints, en particulier celui qui concerne l’interdiction de fumer dans les lieux publics ?
2. Quels sont les moyens humains (nombre d’agents assermentés) et budgétaires qui ont été effectivement consacrés ces dix dernières années à la lutte contre le tabagisme et suivant quels résultats (nombre d’infractions constatées et sanctions appliquées) ?
3. Les campagnes de communication rendues obligatoires par la loi ont-elles porté leurs fruits et fait l’objet d’un retour d’expérience ?
4. Quelles actions concrètes comptez-vous mettre en œuvre pour améliorer la loi du pays n° 2009-4 du 11 février 2009 relative à la lutte contre l’abus du tabac et le tabagisme dans sa version consolidée qui reste toutefois perfectible ?
Je vous prie d’agréer, Monsieur le président l’expression de ma considération distinguée.
Mme Éliane TEVAHITUA